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Accéder au siteDémêler science, croyance et manipulation : les débats sur la prétendue souffrance des poissons révèlent une dérive inquiétante. Quand l’idéologie remplace la rigueur scientifique, c’est la crédibilité du bien-être animal qui vacille !
Un nouvel article scientifique (Diggles et al, 2024) signé collectivement par 20 auteurs indépendants de 17 structures de recherche différentes, issues de 9 pays, démontre avec précision les dérives idéologiques de la littérature scientifique consacrée à la sensibilité animale. Ce pavé dans la mare brise le faux «consensus scientifique» autoproclamé par les animalistes sur la fameuse « douleur » du poisson…
D’ordinaire, les scientifiques sont plutôt réservés, du moins dans la littérature officielle soumise aux comités de lecture, quant aux critiques directes portées sur les travaux de leurs confrères. Mais ils tirent aujourd’hui la sonnette d’alarme, face à ce qu’ils décrivent comme un véritable détournement de la méthode scientifique à des fins purement idéologiques. En cause, la probité des publications de ces dernières années relatives au « bien-être animal » concernant les organismes aquatiques, poissons et invertébrés.
Ce collectif international de chercheurs comprend des spécialistes de renommée mondiale et couvre les domaines suivants : écologie, ichtyologie, neurosciences, halieutisme, biologie marine, physiologie, psychologie, sciences vétérinaires… Ils officient au sein d’universités ou d’instituts de recherche en Allemagne, au Royaume-Uni, en Norvège, mais aussi au Canada, USA, Australie, Russie, Nouvelle-Zélande, Singapour. Un sacré panel ! Que dénonce leur publication ?
Nociception et douleurs sont deux choses bien distinctes !
La notion de douleur est la pierre angulaire du débat. Selon la définition officielle de l’association internationale pour l’étude de la douleur (IASP, 2020), «la douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable associée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle ou décrite dans ces termes». La réponse émotionnelle fait suite à une blessure, qui est détectée par le système nerveux via un processus : la nociception.
La nociception est un processus inconscient, pouvant déboucher sur des comportements automatiques, réflexes, très élaborés : par exemple, un rat décérébré qui ne peut plus ressentir la douleur, cherchera malgré tout à repousser un objet qui le pique, couinera et tentera de mordre. Ces réactions sont bien nociceptives, inconscientes mais sans implication de douleur. Nociception et douleur sont deux choses bien distinctes.
Mais les auteurs de travaux controversés réinventent tout simplement leur propre définition de la douleur, la réduisant justement à des critères neurologiques, comportementaux ou motivationnels qui ne permettent plus de distinguer douleur et nociception.
Par exemple, les premiers travaux de Lynn Sneddon (2003), chercheuse et militante à l’origine de l’essentiel des publications affirmant que les poissons souffrent, ont consisté à administrer de la morphine à des truites ayant reçu une injection d’acide ou de venin. L’analgésique diminuant les comportements anormaux, l’auteur en a conclu qu’il s’agissait d’une preuve de l’existence de la douleur des poissons. Mais cet effet de la morphine peut aussi s’expliquer entièrement par des actions sur la nociception : cela ne constitue absolument pas une preuve que les truites ressentaient de la douleur. Par ailleurs, les opiacés ont divers effets sur le système nerveux en plus de réduire la signalisation nociceptive : il n’y a donc aucune certitude que l’effet de la morphine soit même spécifique à la nociception ! Enfin, c’est une dose dépassant la dose mortelle chez les mammifères qui fût injectée aux truites. Cette énorme dose, qui n’a pas modifié leur comportement de nage, indique que la réponse de la truite à la morphine est totalement différente de celle des mammifères, humains y compris.
Beaucoup de travaux récents s’inspirent directement de ces « références », font appel à des termes très subjectifs comme la « sentience », utilisent un vocabulaire chargé de psychologie humaine (poissons dépressifs, heureux, pessimistes ou optimistes…). Tout cela facilite l’anthropomorphisme et invite à croire à de fausses équivalences entre le ressenti des animaux et celui des humains. Ces amalgames et ces confusions subtiles sont utilisées dans un objectif précis, celui d’installer une idée : poissons et invertébrés souffrent, comme nous. Un glissement s’opère, nous sortons du domaine de la science.
Redéfinir la douleur et ses critères aboutit à décrire toute modification comportementale (apprentissage et évitement, choix différents, toute adaptation en somme) comme « compatible avec la douleur ». Cette déduction est rapidement assimilée à une preuve, validant le postulat de départ. C’est ce que Diggles et ses collègues appellent le test d’hypothèses irréfutables, une autre dérive de ce pan de la littérature sur le bien-être animal. Ce faisant, les chercheurs incriminés font abstraction des explications alternatives des résultats de leurs expériences.
Plus grave encore, l’article de 2024 démontre l’ignorance sélective ou le rejet des études et faits contradictoires, qui ne cadrent pas avec l’hypothèse de la douleur chez les poissons et les invertébrés. Ils dénoncent le manque de revues rigoureuses, impartiales et transparentes de la littérature, fondées sur une évaluation critique. Au lieu de cela, des synthèses bibliographiques à sens unique voient le jour, comme ce fût le cas en 2021 sur les crustacés et les céphalopodes décrits comme des êtres sentients, sensibles à la douleur et susceptibles de souffrir malgré deux synthèses scientifiques ayant conclu exactement l’inverse en 2019. L’objectivité et la rigueur en prennent un coup avec cette nouvelle forme de « cancel culture ».
Un très faible taux de fibres nerveuses de type C : une adaptation à la vie en milieu hostile...
Il en va de même pour les poissons : dans une synthèse de 2023, Sneddon ne cite pas certains travaux (2014) auxquels elle avait elle-même pris part… mais qui montraient l’absence d’effet physiologique de piqûres d’hameçons sur des morues atlantiques ! Travaux cohérents avec d’autres, sur le brochet (2017), ou d’autres encore sur une cousine de la perche soleil (2021) … et qui s’expliqueraient très bien au regard de connaissances, elles aussi, effacées des revues orientées. Des études ont en effet montré que les poissons ont un très faible taux de fibres nerveuses de type C, de l’ordre de 4-5%. Or, ce sont ces fibres lentes qui véhiculent la douleur lancinante, consciente chez les mammifères, chez qui elles représentent 80% des fibres cutanées. Chez les humains atteints d’un trouble d’insensibilité congénital à la douleur, ce taux chute à 24% ; les poissons en ont encore 5 fois moins. En revanche, ils possèdent des fibres rapides, réflexes, de type A-delta, ce qui leur permet de réagir vite face à un stress (fuite, évitement…). Cette caractéristique semble adaptée au milieu hostile dans lequel ils vivent : fortes densités de prédateurs, compétitions alimentaire et territoriale permanentes, crues, sécheresses, avec des taux de mortalité naturellement très élevés.
Pour bien illustrer les propos de ces 20 chercheurs, nous pouvons tout simplement citer l’avis scientifique de l’EFSA, organisme de référence européen, sur la douleur des poissons (2009) : 9 citations sur 17 réfèrent à Sneddon. Malgré la mention de l’existence de « vifs débats sur la question », à aucun moment le rapport de l’EFSA ne mentionne les arguments contradictoires. Une synthèse bibliographique française du Centre National de Référence pour le Bien-Etre Animal y consacre un paragraphe en mars 2024 : un tiers des citations renvoie à Sneddon et il n’est fait mention d’aucune des nombreuses publications contradictoires. Aucun recul n’est pris sur les interprétations proposées, dans la droite ligne de la démonstration de Diggles et al, 2024. Parmi les déviances de la méthode scientifique, les auteurs soulignent également le manque de preuves empiriques reproductibles. Ainsi, certaines études de faible qualité mais bénéficiant d’un écho médiatique important s’avèrent, quelques années de recherche plus tard, non reproductibles… mais dans le cycle médiatique moderne, les correctifs ou les rétractations sont invisibilisés par les gros titres à sensation. Les associations véganes antispécistes comme L214, au coeur du mouvement antipêche, surfent justement sur cette vague. Ils ont nommément remercié Sneddon pour son appui à leurs activités en 2022... avant de retourner faire la promotion des produits véganes de leurs mécènes de la Silicon Valley (voir «La face cachée de l’antispécisme»). Car ne nous y trompons pas : ce sont bien les intérêts financiers de l’industrie de la Food Tech qui avancent à l’échelle européenne sous couvert de «bien être animal».
Autre signe de dégradation de la qualité du débat scientifique, les auteurs signalent des attaques personnelles sur les chercheurs qui critiquent l’hypothèse de la douleur des poissons et des invertébrés, plutôt que sur leurs arguments. Des appels à la cancel culture commencent à voir le jour au sein même des publications, avec des articles suggérant de bannir l’aquaculture des céphalopodes et la vente de crustacés au nom du bien-être animal.
Ce contexte est susceptible d’entrainer des conséquences majeures vis-à-vis de l’alimentation et de l’usage des animaux en général, avec de forts risques d’effets indésirables de type perdant/perdant pour les hommes et les animaux, par la prise de réglementations inappropriées. Les chercheurs appellent à restaurer un standard élevé de qualité scientifique afin de fonder la prise de décision politique sur des données probantes.
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